CONFIANCE RÉCIPROQUE Séverine Prodhomme, directrice de l'Ardefa, Emmanuel Geay, directeur de Tipiak panification et Bertrand Declomesnil, président de l'Ardefa et de l'association normande des industries alimentaires : « Le succès repose sur un groupe pluridisciplinaire, motivé, assidu, et qui a travaillé avec une confiance réciproque».
En France, les industries alimentaires représentent 2,4 % des salariés, mais ont généré, en 2011, 9,7 % des troubles musculo-squelettiques (TMS) et 10,1 % des journées perdues. « Le coût moyen d'un TMS est de 21 512 euros, rappelle Cédric Leborgne, ergonomeconsultant pour la société H3DT à Rouen. Les absences perturbent l'organisation du travail et peuvent amener à une problématique de reclassement ». Face à l'augmentation continue des maladies professionnelles, six entreprises de l'Ardefa(1) de Basse-Normandie ont décidé de mettre en commun leurs projets et leurs actions : Tipiak panification, Gel Manche, Brocéliande, Socopa, Biscuiterie de l'Abbaye et Stefano Toselli.
Avoir un regard neuf
Durant deux ans, des rencontres d'une demi-journée ou d'une journée tous les deux mois ont permis d'établir un diagnostic et de comparer les outils et méthodes utilisés. « Ces réunions étaient parfois complétées par une visite d'usine qui permettait d'avoir un regard neuf de la part du groupe », souligne Emmanuel Geay, directeur de Tipiak panification, à l'initiative du projet. La Carsat(2) s'est également associée à la démarche et a participé aux trois modules de formation d'une journée et demie, animés par Vincent Guilloux du cabinet Solutions Productives. Au programme : ergonomie, conception des situations de travail, liens entre troubles musculo-squelettiques et risques psychosociaux. « Le succès repose sur un groupe pluridisciplinaire associant directeurs, infirmières, responsables qualité, sécurité et ressources humaines, motivé, assidu, et qui a travaillé avec une confiance réciproque en toute convivialité », ajoute Emmanuel Geay. Toutes ces rencontres ont débouché sur des projets concrets avec une analyse du poste de travail (vidéos, photos, mesures) et l'implication des opérateurs. Ainsi, sur une ligne de produits spéciaux faits à la main, Gel Manche a installé un bac élévateur. Brocéliande s'est attaqué à la transformation d'une ligne de moulage. La Biscuiterie de l'Abbaye a fait l'acquisition d'un logiciel qui associe ergonomie et productivité et envisage l'investissement dans un robot pour les postes les plus exposés.
Formation-action Act'Alim
« De ces réunions, il ressort que les personnes en charge du sujet ont besoin d'acquérir des compétences spécifiques », constate Séverine Prodhomme, directrice de l'Ardefa. Avec la Carsat et la mutualité sociale agricole, l'association lance une formation-action appelée Act'Alim pour permettre aux entreprises d'expérimenter et de mettre en place une démarche de prévention des TMS. Cette formation cible trois types de publics : directions, CHSCT (comité d'hygiène, sécurité et conditions de travail) ou délégués du personnel, et futurs référents TMS. À l'image du groupe qui a fonctionné depuis deux ans, « la formation s'organise au travers de réunions collectives regroupant des entreprises qui veulent acquérir des compétences internes pour lancer des actions, ajoute Séverine Prodhomme. Elle s'appuie sur une volonté forte de la direction de mener une démarche de prévention ».
<p><i>(1) Association régionale pour le développement de l'emploi et des formations dans les IAA.</i></p> <p><i>(2) Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail.</i></p>
Act'Alim : un planning de formation sur un an
La formation animée par la Carsat Normandie et la MSA a quatre objectifs : renforcer les connaissances sur les TMS, structurer une démarche de prévention, savoir analyser un poste de travail et partager les expériences avec d'autres entreprises.
Chaque public : direction, référents TMS, délégués du personnel, suivra un module d'information ou de formation spécifique. En intersession, les référents TMS pourront mettre en pratique sur un poste de travail les acquis théoriques. Ils seront accompagnés par un technicien de prévention.
En tout, six réunions d'un ou deux jours, auxquelles s'ajoutent les travaux intersession, sont prévues sur un an. Le financement est assuré par l'État, la région et Opcalim dans le cadre de la charte de coopération agroalimentaire.